"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

jeudi 17 mai 2012

Ô vieillesse ennemie !



Grande tristesse pour cette ville blessée, humiliée, déclassée, méprisée, reléguée. Hier encore dirigée par le plus éminent ministre de la République, elle se retrouve aujourd'hui ravalée au rang de cité ordinaire, ignorée d’un gouvernement d'opposition après que, grâce à moi, elle eut repris goût à une première place qui lui revient de droit. Une ville qu’on prétend rayer de la carte, osons le dire, puisque l’on est allé jusqu’à s’assurer que le titre prestigieux qui m’échoyait – ministre d’Etat – disparût du générique gouvernemental pour mieux nier demain qu’il eût jamais existé, ou bien m’en grimer au contraire pour railler ma désuétude. Comme s’il ne suffisait pas à la déchéance municipale que j’eusse, non sans élégance, renoncé la semaine dernière au fauteuil parlementaire inhérent à ma charge.

« Eh bien, ma chère et vieille cité, comme eût dit le Général, nous voici donc ensemble, encore une fois, face à une lourde épreuve » : nous sommes déministrés ! Cruelle situation, indigne de mon rang comme de ton histoire, y compris aux heures les plus sombres de l’Occupation. Denise toussote, qui m’assure avoir aperçu à l’instant ma pie voleuse sur la première chaîne, radieuse en bout de table au conseil des ministres. Quel ridicule ! Je n’ignore pas sa propension à prendre toujours ma place mais, de grâce, compare-t-on un ancien Premier ministre, ministre d’Etat régalien, à une petite déléguée dont le maroquin agace la narine avec sa forte odeur d’hospice ! Soyons francs : on voit bien là à quelles dérives peut conduire le dogme paritaire, dans un gouvernement qui clame faire de la jeunesse son cheval de bataille ! Ces dames vont y faire leur petite cuisine avec la dépendance...

Reçu à l’instant sur mon iPhone une façon de photo de mariage, sur quoi un ami qui me veut forcément du bien me propose de chercher « notre demoiselle d’honneur ». Ne la fréquentant point, je serais bien incapable de la reconnaître dans la rue, a fortiori sur un minuscule écran de téléphone. Un indice : elle est, paraît-il, au dernier rang. La belle affaire ! Je figurais moi-même il n’y a guère au premier, à côté d'un vrai président : cherchez la différence... M’observant avec malice, Denise m’assure que, l’œil fixé sur mon téléphone, je lui évoque un animal qui remuerait la queue. Lui jure n’éprouver, à la nouvelle de cette fausse promotion, plus de joie que le pauvre chien de la péronnelle qui sait faire la différence, lui, entre un os véritable et une imitation de portefeuille. « Je pensais plutôt à un félin, précise-t-elle, dont l’appendice caudale trahit l’énervement par son agitation… » Balivernes ! Je suis une statue de marbre qu'on n'a jamais vue montrer en public le moindre agacement.

Quoi qu'il en soit, qu’on ne compte pas sur le maire que je suis pour céder à je ne sais quelle obligation protocolaire face à cette sous-ministre, nonobstant son goût très prononcé pour l’étiquette ! J’ai mieux à faire, croyez-moi, que de lui filer le train dans les maisons de vieux de la ville en lui donnant du « madame la ministre » ! A la réflexion, ce n’est pas le moindre des paradoxes que, en m’empoisonnant jour et nuit, cette infernale agasse mette chez moi en péril le « bien vieillir » dont elle prétend par ailleurs faire son fonds de commerce jusqu’au sein du gouvernement ! Infernale, disais-je : c'est le mot juste. Me revient soudain à l’esprit le propos d’un collègue du gouvernement que nous nommons affectueusement Zadig révolté entre nous – nommions, devrais-je dire, il va falloir m’y faire… Il s’agissait à l'en croire, j’ai oublié pourquoi, d’une brève citation de Maxime de La Rochefoucauld (sic !) : « L’enfer des femmes, c’est la vieillesse. » Puisse le plus grand de nos moralistes avoir raison ! Par la grâce d’un président diablement paritaire, je tiendrais peut-être alors enfin ma vengeance…

5 commentaires:

Observateur a dit…

Vous oubliez de préciser, M. Youpi, que vous allez sans doute accueillir fin juin une seconde députée dans votre conseil municipal. Ajon secrète de votre dame de pique ?

Chantal a dit…

No panic Alain, je suis là comme d'hab' ! Ministre ou pas, si elle vous colle d'un peu trop près, un bon coup de popotin et elle dégage ! Non mais !

alphonse a dit…

Chantal...Morano..?

Alain Youpi a dit…

@ alphonse
Non,non,pas du tout. Encore que, à la réflexion, il y a peut-être un peu de ça, vous n'avez pas tort...

Alain Youpi a dit…

@ Observateur
Tenez-vous au courant mon Cher Ami, je crains que votre montre ne soit déjà plus à l'heure.