"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

vendredi 15 juin 2012

Pipiltzintzintli ?



En toute confidentialité, c’est d’une bien curieuse expérience que je voudrais aujourd’hui entretenir les lectrices et les lecteurs de ce blogue, dont certains, me dit-on, auraient été intrigués ou déroutés ces derniers jours par mon humeur ou mes propos. Croira-t-on que cette aventure peu ordinaire a commencé il y a des années par un banal bouturage après que, sur le bacon d’une copine à Montréal, Denise eut remarqué une plante qu'elle prit pour de la menthe ordinaire. Informée que cette « menthe magique » pouvait se consommer en infusion, elle rentra à la maison avec une bouture qu’elle mit aussitôt en pot. Ma femme ayant la main verte autant que digitale, grandit bientôt chez nous une « herbe de Marie » généreuse qui fit l’admiration des voisins, avant de prendre un jour avec nos bagages le chemin de Paris, où elle s'acclimata comme nous l'avions fait nous-mêmes dans son pays.

Laissée une nuit sur un rebord de fenêtre, notre empotée ne survécut pas hélas à l’assaut brutal de l’hiver en février dernier. Comme on va voir, mon regret témoigne moins d’un quelconque intérêt pour les plantes – à quoi je suis en général aussi indifférent qu’à mes prétendus semblables – que des conséquences imprévisibles d'une disparition a priori sans importance. Au moment de livrer la défunte à notre vide-ordures, Denise eut en effet l’idée d’en faire sécher les feuilles meurtries sur un vieux Figaro, une bonne décoction pouvant se révéler salutaire si l’hiver s’installait durablement sur la capitale. La météo confirmant une extrême rigueur, « salvia divinorum » –  la sauge des devins – fut oubliée dans un pot à confiture remisé sur une étagère de la cuisine, au bénéfice de vins chauds et autres grogs, plus alléchants sinon plus efficaces.

C’est là que je redécouvris en début de semaine l’herbe de ma bergère, par un petit matin triste où j’eus souvenance des tilleuls sucrés de ma grand-mère landaise, miraculeux pour dissiper les angoisses récurrentes d’un enfant surdoué que désolait la médiocrité mesquine de ses congénères. Le pot n’étant qu’à moitié plein ou presque des feuilles desséchées, je l’emplis d’eau bouillante pour les laisser infuser pendant que je commençais de lire la presse. Après l'avoir filtrée, je consommai ensuite à petites gorgées ma potion à maire, accompagnée de notre quotidien régional en guise de tartine. Il y était question de mon candidat-méthadone de la deuxième circonscription (un jeune homme aimable qui ne manque pas de crans) fustigeant l’horreur de la légalisation du cannabis, dans l’hypothèse funeste d’une réélection de ma dame de pique à l’Assemblée nationale.

Ledit journal me tomba bientôt des mains : rien d'inhabituel depuis qu’il a pris ostensiblement le parti des usurpateurs. Ce n’était pas cette fois cependant à cause du dégoût ou de la colère, mais curieusement comme sous l'effet d’un puissant psychotrope. « J’hallucine ! », m’exclamais-je intérieurement, avalé par des images qui, aussi mouvantes que des sables anthropophages, me rappelaient sans plaisir le temps de mes vingt ans dans les années soixante. La nausée fut à son comble quand je pris conscience – si l’on peut dire ! - d’être encerclé par un couple constrictor aux contours déformés et incertains, improbable construction psychédélique multipliée à l’infini par un kaléidoscope sonore. L’un des deux visages était celui de mon agasse, on l'aura deviné, et l’autre le minois du traître bouclé, pacsé juste avant le gong pour perpétrer son incroyable forfait législatif !

Soyons francs : je me trouvais dans un « bad trip », ce que confirma un syndrome post-hallucinatoire persistant, sur les ondes comme dans les meetings si j’en crois les commentateurs, dont les moins bien intentionnés n’hésitent pas à parler de phobies, d’état confusionnel, de bouffées délirantes, que sais-je encore ! Bref, il est grand temps que cette éprouvante séquence politique se termine. N'en ignorant pas l'issue, j’ai pris soin de garder dans leur bocal, conservé au frigo, les feuilles encore humides de ma tisane, pour les proposer à ma doublure dimanche soir après sa dérouillée. D’ici là, qui me dira le sens de ce mot imprononçable qui me martèle la cervelle depuis mon bien curieux voyage, tel le chant d'une pie, insupportable : pipiltzintzintli ?!

2 commentaires:

Simon C. a dit…

Dis donc Youpi, c'est qui qui va te protéger de ta dame de pique à coups de popotin dans les cérémonies, maintenant que Mairie-Chantal a été éjectée du Palais Bourbon ?

Anonyme a dit…

pipiltzintzintli :

https://tolohuaxihuitl.blogspot.fr/2012/07/piltzintzintli-un-alucinogeno-sin.html