vendredi 4 mai 2012
Le génie du crétinisme
Est-ce
pur hasard si, en quête d’un exemplaire de mes Cerises pour une dédicace, je me
suis retrouvé ce matin avec entre les mains les Mémoires d’Outre-tombe ?
Ouvert à l’aveugle, François-René me
lança aussitôt à la figure cette maxime tant soit peu provocatrice :
« En général, on parvient aux affaires par ce qu’on a de médiocre et l’on
y reste par ce qu’on a de supérieur. » Du haut de son œuvre, ce lointain prédécesseur au
Quai était assurément à cent lieues d’imaginer qu’un steak, certes grillé,
assurerait sa postérité plus durablement que son œuvre littéraire ou sa
diplomatie. Si la politique est bien en effet parfois affaire de cuisine, je ne pense
pas pour autant qu’il traverse jamais l’esprit de mes biographes des siècles à
venir d’inscrire une telle citation en exergue de leurs ouvrages. A n’en pas
douter, ils retiendront au contraire que j’ai toujours mis une exceptionnelle supériorité – avérée dès le plus jeune âge – au service de l’Etat, tenant par ailleurs en mépris la
médiocrité de l’écrasante majorité de mes congénères et de mes congénères.
A
ce propos, c’est bien à tort qu’on me fait aujourd’hui procès d'avoir traité les
membres de l’opposition municipale de crétins. Outre que je ne vois pas en quoi
cette marque d’affection peut constituer une injure diffamatoire, je me garde
bien d’en assurer l’exclusivité aux élus socialistes de la ville. Je tiens en effet dans le même respect, il va sans dire, les membres de ma majorité, à cette différence près que
ceux-là sont des crétins respectueux, discrets, soucieux de ne pas entraver mon génie
dans sa course. Au demeurant, nos socialistes effarouchés n'ont pas plus de notions d’étymologie que de démocratie, sans quoi il n'ignoreraient pas que le bon crétin n’est qu’une variante
alpine du bon chrétien, par moi utilisée avec la douce compassion de ses
origines. A l’heure où, un bulletin de vote à la main, les mahométans s’apprêtent
à faire la loi dans ce pays, il est grand temps que les vraies Françaises et
les vrais Français se croisent, comme le fit saint Louis, plutôt que de renier leur crétinisme !
Crétin ! Soyons
francs : c’est un mot autrement plus fort, ramassé en trois lettres, que m’a
inspiré hier soir la trahison d’un vieux compagnon de route à la sauce
béarnaise, bien nommé gascon pour la rime sinon pour la raison. A tu et à toi
avec la Vierge troglodyte qui depuis son apparition lui montre le chemin, ce grand
crétin de souche a complètement désemparé ses brebis dispersées dans mon
troupeau municipal. Affolées, elles semblent condamnées au
grand écart, entre leur dévouement à ma cause locale et leur dévotion à l'ombrageux pasteur qui, contre toute attente, vient de s’offrir sans pudeur
au tombeur annoncé du rikikisme... Passé la colère, comment du reste cacher
mon propre embarras dans cette affaire ? Ayant besoin du soutien de ce converti, je
me dois d’apporter le mien propre à son entreprise, selon les principes de la
chevalerie comme au nom de notre communion en Jésus Christ. J’hésite pourtant à
envoyer avant minuit à l’AFP la dépêche annonçant mon ralliement au Corrézien… Oh !
Non point par égard envers Razibus, dont déjà j’ai fait comme tous les miens mon deuil, mais à cause de l’impossible, la cornélienne décision à quoi me condamnerait, à sa suite, le
franchissement illégal de la frontière !
Vous
ne voyez pas ? Moi non plus à vrai dire... Renoncer à déloger ma dame de pique de l’Assemblée nationale, passerait encore, quels qu'en fussent mon dépit et ma douleur... Mais apporter mon
soutien militant à son odieuse candidature, non, c’est au-dessus de mes forces, fût-ce pour
sauver de l’éclatement ma majorité municipale ! Non, vraiment, je ne me résoudrai
jamais à tel abandon : il me faut avant ma mort faire mordre à l'ennemie la poussière, j'en ai fait devant Dieu le serment !
Denise, bien entendu, n’est pas de cet avis, qui me rappelle mon pouvoir de séduction, ma situation de personnalité de
droite préférée des Français, la promesse de Rikiki pour Matignon. Mon ralliement
opéré dans la nouvelle majorité présidentielle, m'assure-t-elle, l’hôte socialiste de l’Elysée
aurait-il d’autre choix que de me confier la direction du gouvernement de
la France ?... Quoi ?! Pardon ?! Pour me retrouver au conseil des ministres face à ma pie voleuse,
sous-secrétaire d’Etat à l’ornithologie ?! Non merci, jamais ça, sur la tête de ma mère ! Plutôt passer l'agasse au gril le 17 juin comme j'en rêve nuit et jour depuis cinq ans, façon chateaubriand. Et la servir enfin à ses électeurs avec une bonne
béarnaise, évidemment !
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