"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

dimanche 22 mai 2011

Ground Zero


Une fois n’est pas coutume, je consacrerai une partie de ce billet municipal à l’actualité internationale qui vient de foudroyer la France, tel un séisme déclencheur de tsunami atomique. Si je condamne à la fois ses idées politiques et le mode opératoire dont l’accuse peut-être à tort la justice américaine, on comprendra néanmoins mon empathie pour l’homme d’exception brisé dans son élan vers la présidence de la République. Une question me taraude en effet : pourquoi les meilleurs d’entre nous trouvent-ils invariablement des juges au travers de leur route, comme si, décidément maudite, la République était condamnée à n’accorder ses faveurs qu’aux plus médiocres, quand il ne s’agit pas de cancres de la pire espèce ? Ce n’est pas l’amertume qui guide ma plume, je l’assure, mais seulement un profond sentiment de gâchis et d'injustice.

Un sentiment renforcé par un détail topologique dont se repaissent les médias : l’homme qu’on disait hier aussi puissant que le président des États-Unis aurait trouvé provisoirement refuge près de « Ground Zéro » à New York. Quel terrible symbole ! Peut-on tomber plus bas après avoir monté si haut, telle une tour jumelle de Barack Obama ? Ô souvenirs enfouis sous les décombres ! N’ai-je point moi-même connu pareille humiliation dans une assignation volontaire à résidence au Nouveau Monde ?… Dieu a-t-il donc installé son purgatoire en Amérique du Nord, pour y faire expier aux plus éminents de nos compatriotes jusqu’à leurs moindres turpitudes ?

Inauguration hier de l’immense ponton qui flotte désormais en majesté sur notre fleuve. Acclamé à Yamoussoukro avec Razibus, je ne pouvais hélas me trouver physiquement auprès des miens pour présider à cette superbe cérémonie festive. Relégué au deuxième rang, derrière Ouattara et Rikiki, pensé très fort à mes administrées et à mes administrés… Imaginé les gracieux paquebots d’avant les vilains immeubles flottants qui, naguère encore, se décrochaient joyeux de nos bittes d’amarrage, pressés de rejoindre à Manhattan la plus superbe des femmes : la statue de la Liberté ! Agitant leur mouchoir sur le pont, les hommes déjà rêvaient à ses caresses lascives de l’autre côté de l’océan… Combien d’entre eux a-t-elle gardé dans son coeur ? Combien dans ses menottes ? Sans se départir d’une gravité qui est sa marque, un jeune conseiller à qui je confiais plus tard ces réflexions pointa la situation cocasse de l’homme du Sofitel. « Dans cette affaire, me dit-il, la police américaine le considère comme un agresseur sexuel, alors que nombres de commentateurs le tiennent chez nous pour un simple témoin à décharge. » C'est une façon de voir la chose.

A ce propos, notre grand quotidien régional a salué cette semaine le « projet follement audacieux » que j’ai retenu pour l’érection d’un grand centre culturel et touristique du vin. Soyons francs : cette puissance architecturale et scénographique sans précédent va donner un sacré coup de vieux au Guggenheim de Bilbao ! Ithyphallique en diable à défaut d'être pioupiesque, ce bâtiment futuriste de quarante-cinq mètres de haut dominera les flots abracadabrantesques du fleuve, pour se mesurer aux tours du pont levant et célébrer fièrement la gloire de nos vins de vigueur ! Un concours populaire est lancé pour donner un nom à ce gigantesque phare de la cité, fils de celui d’Alexandrie merveilleusement mis en lumière. On aura sans doute compris que je souhaiterais en faire le centre Arthur-Rimbaud. Hélas, ce n’est pas gagné dans une ville où la poésie gagne comme le reste à sentir le bouchon mais en aucun cas le soufre !

Un sien « ami », me dit Denise, aurait plus judicieusement proposé « Cosmic Shit » sur Facebook. Je reconnais qu’il y a un peu de cela, qui pourrait être après tout un bel hommage à nos trottoirs en même temps qu’à nos crus. La traduction française, façon « étron cosmique », ne me paraît cependant pas des plus appétissantes pour attirer le chaland. Nisa me promet de demander à ce mystérieux ami de poursuivre ses efforts, pour nous pondre si possible quelque chose de moins glissant et de plus présentable. A ce propos, une idée me trotte dans la tête depuis quelques jours… Je crois que la France admettrait difficilement qu’un faux pas, se révélât-il criminel, privât définitivement le monde de son plus brillant économiste. Puisque la banque européenne pour la reconstruction et le développement est de retour dans l’actualité médiatique, me dit-on, ne pourrait-on envisager de mettre l’ancien patron du FMI dans la Berd quand il sera sorti du pétrin ? En toucher un mot demain à Rikiki.

1 commentaire:

Motard sympa a dit…

Pourquoi pas donner au centre du vin le nom de saint-Colombin, patron des motocyclistes, qui boivent pas tous de la bière, hein ? C'est sobre et ça ferait très classe, non, et l'évêque pourrait le baptiser avec du vin de messe ? Ou alors on l'appelle "Colombinium", qu'est-ce que vous en pensez ? En tout cas, ce machin va porter bonheur à tous ceux qui marcheront dedans, c'est sûr. Ca va attirer du monde de loin, bravo !