"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

dimanche 15 février 2009

Liter, militer, déliter


Sait-on le verbe qui définit l’action de superposer les poissons salés dans les barils ou les caques ? Non. Grande tristesse face à l’érosion de la langue, ou à la porosité de neurones oublieux qui la laissent s’échapper de notre mémoire collective. Je veux parler de "liter", croisé récemment en flânant dans un vieux Larousse rescapé de mon enfance de pinèdes. Repensé à lui cette semaine, à la faveur d’une nouvelle immersion dans le bain militant de notre grand parti départemental. Non pas que mes compagnons de la septième circonscription sentissent le poisson en saumure plus que le Roussy mais, à les écouter grogner, je n’ai pu m'empêcher de rapprocher "liter" et "militer" ; c’est qu’ils ne semblent adhérer qu'à demi à la politique d’un président qui, ces jours-ci, lite systématiquement en couches successives ministres et médiateurs, les seconds appliquant un baume sur des plaies salées par les premiers, pour en calmer la morsure. Cette politique à la sauce "sweet and sour", façon asiatique, ne manque pas de dérouter des palais plus familiers chez nous de la garbure, du confit et des graves.


Ainsi des enseignants-chercheurs qui sont dans la rue. Qu’y cherchent-ils et quel enseignement doit-on en tirer ? Soyons francs : que diraient-ils eux-mêmes s’il prenait, à la foule de nos administrés dont la rue est l’unique domicile, d’occuper les amphithéâtres et les laboratoires de recherche avec leurs chiens, pour s’y tenir au chaud ? Ils veulent, me dit-on, être associés à la réforme de leur recrutement, de leur rémunération et de leur notation. Diable ! Plutôt que d’être évalués scientifiquement, voudrait-on que les plus mauvais d’entre eux fussent dénoncés à la ministre par les meilleurs, à la faveur de quoi on renouvellerait aux délateurs leur permis de séjour à l’université ? Soyons sérieux, nos facultés ne sont pas des caques empestant ce type de saumure ! Croyez-moi, quand on veut conduire une réforme, la dernière chose à faire est de consulter ceux qu’elle concerne, qui s’efforceront de la freiner. On ne contestera pas sur ce point mon expérience et ma prétention à savoir ce dont je parle. Je suis constant dans ce domaine comme en toutes choses : il faut imposer, sans concertation ni médiation. Le peuple a besoin de sentir la poigne, surtout quand il rue dans les brancards.


Cela dit, très sincèrement, je ne vois pas la France se déliter. Loin de moi l'idée de nier pour autant certaines turbulences, dont il ne me déplairait pas du reste, je l'avoue, qu’elles pussent déstabiliser un blême pygmée hexagonal, à qui le miroir abusé de sa salle de bain renvoie chaque matin l'image d'Obama. Notre pays est sans conteste dans une mauvaise passe mais, s’il sait rapidement mettre son destin en de bonnes mains, que j’ai propres et musclées, il se relèvera demain avec panache, comme il a su le faire au siècle dernier. Nous avons ici, mon Général, une rue Sainte-Colombe et, aussi, bien plus de deux églises ! Je ne laisserai pas un clown, fût-il dans votre fauteuil par la volonté d'un peuple crédule, abîmer votre Grand Œuvre, dont j’exigerai le classement au patrimoine mondial de l’UNESCO ! Et, quoi qu’il m’en coûte, je n’hésiterai pas une seconde, comme vous avez su le faire, à prendre d'abord la tête du gouvernement, pour rendre la France à votre Grandeur.


On aura compris que je demeure optimiste et déterminé. Comme l’a rapporté la presse locale, toujours atttentive au moindre de mes propos, je préfère en effet voir mon verre à moitié plein qu’à moitié vide. Ne parlant que de moitié, je ne voudrais pas néanmoins qu’on me rangeât dans la catégorie des mi-litants évoquée plus haut. Qu’il soit donc clair que je préfère bien sûr un verre carrément plein à un verre complètement vide, mais la conjoncture est hélas difficile, et le verre fort fragile. Notamment dans la filière viti-vinicole, dont on sait qu’elle m’est chère. En refusant obstinément la publicité pour l’alcool sur l’Internet, ma pie voleuse prône ni plus ni moins la politique du verre vide. Elle prétend s’opposer aux seuls alcools forts et non pas au vin ? Quelle hypocrisie ! La réalité, c’est qu’il y a plus d’hôpitaux que de châteaux dans sa circonscription : elle donne dans le clientélisme. Et le corporatisme, défendant l'hôpital contre l'ébriété. Puisque la vérité est dans le vin, il ne reste à l'oiselle chapardeuse que l'ignominie du mensonge. Mais nul n'ignore plus aujourd'hui qu'on meurt moins dans ce pays d'alcoolisme que de maladies nosocomiales : je sais que les Français, en trinquant à sa santé, rendront bientôt grâce à ma chère Roselyne d'avoir, une bonne fois pour toutes, délité leur funeste et public hôpital.

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