"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

lundi 7 septembre 2009

Haematopus ostralegus

Mea culpa. Ayant égoïstement négligé ce blogue durable dans les chaleurs d’août, j’en éprouve aujourd’hui un très grand regret. En cette rentrée, je prends donc la ferme résolution de ne plus abandonner à leur noire solitude les Françaises et les Français qui sont dans le besoin de ma lumière. Qu’ils acceptent la reprise de ce fructueux monologue avec eux comme le signe de mon hommage et de ma résipiscence.


J’ai évoqué ici en juillet ma passion de l’ornithologie estivale dans les Landes, à quoi j’ai pu m’adonner avec plaisir cette année encore, à Hossegor et à Seignosse où l’on rencontre parfois de drôles d’oiseaux, comme en politique. Pour l’assouvir, j’avoue avoir même poussé cette fois jusqu’en Islande, profitant d’une offre touristique avantageuse en raison de la faillite de ce pays, grâce à la crise financière mondiale. "Terre des extrêmes et des contrastes à la limite du cercle polaire", comme on dit dans les guides touristiques, cette île est aussi fascinante par ses oiseaux, que j’ai pu observer des heures durant à la jumelle. Faute de place, je n’évoquerai ici que l’étonnant Haematopus ostralegus, communément appelé huîtrier pie, sorte de grosse agasse au bec rouge et aux pattes roses, particulièrement habile à l’ouverture des mollusques bivalves. Allez savoir pourquoi, je suis tombé sous le charme de ce volatile trop rare sous nos latitudes, dont le chant septentrional résonne encore dans mes oreilles en cette rentrée : "klip klip klip" ! Denise m'assure que je l'imite très bien.


A propos de mollusques bivalves, ma rentrée s’est donc faite à Seignosse, comme on sait, avec mes joyeux compagnons de la majorité présidentielle. Soyons francs : même l’été, il ne faut pas à notre époque compter sur l’université pour former les élites ; on sait cela dans les grandes écoles que j'ai seules fréquentées. Les grosses têtes n'étaient donc pas légion dans cette cité balnéaire, et sans doute l’activité cérébrale était-elle plus intense aux Estagnots ou aux Bourdaines, dans les premiers jours de septembre, que sur ce pauvre campus à ministres improvisé sous des tentes.


A qui d’autre qu’à moi, figure tutélaire du Grenelle de l’environnement, pouvait-on dès lors demander comment ne pas asphyxier la majorité avec cette maudite taxe carbone ? Certainement pas à un ministre plus familier des vapeurs éthyliques que du dioxyde de carbone. Droit dans mes gougounes*, je n’ai donc pas tourné autour du pot : "Un bon leader doit savoir entraîner et convaincre", ai-je déclaré à la presse. Razibus le Grand, qui en privé me donne pour mort, a reçu cinq sur cinq, me dit-on, ce clair message de l’Au-delà : on démarre doucement les Français au chausse-pied avant que de se les faire aux forceps, même un légionnaire sait cela ! Comment, Premier ministre, aurais-je moi-même réussi mes réformes sans ces fondamentaux ? L’arrogance ne peut tenir lieu de communication politique ; il manque une propédeutique à ces universités d’été, et beaucoup de savoir-faire à ces ministres bavards.


Yann Arthus-Bertrand et ses grands banquiers de GoodPlanet sont mieux avisés que nos gouvernants ; ils viennent intelligemment, en effet, de me nommer vice-président de leur prestigieuse fondation durable, dont je n’étais jusqu’à ce jour qu’une modeste personnalité qualifiée. C’est autre chose, croyez-moi, qu’une soi-disant mission de représentation des régions dans une vague officine écologique des Nations Unies. Il n’y a pas photo, comme me l’a dit Yann en me félicitant ! J'ai maintenant les moyens de sauver la planète, sans attendre les compliments du petit Tom de l’Elysée ou de la dame aux chèvres du Poitou. Au travail !


Quelques mots sans rapport sur Jean Jaurès, fondateur de L’Humanité, journal moribond des vestiges du parti communiste français. A l’occasion du cent cinquantième anniversaire de la naissance du feu député du Tarn, ma gazza ladra – à ne pas confondre avec l’honnête huîtrier pie, quand bien même elle a comme lui les pattes roses – me somme de retrouver sa statue, si on l’en croit érigée jadis en majesté sur la place qui continue de porter son nom. Franchement, me voit-on faire toutes les caves de la ville avec un casque de spéléologue ? Combien de têtes de vieux barbons de la IIIe République risquons-nous de retrouver dans ces capharnaüms ! Ils se ressemblaient tous ! A vrai dire, il serait plus sage de penser à rebaptiser l’endroit. Je propose donc "place de l’UNESCO", pour faire le pont entre cette honorable institution et l’Europe, dont la maison se trouve justement là.

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* Tongs, en québécois.

1 commentaire:

Iker Otsoa a dit…

Youpi youpi ya c'est la rentrée ! Content de vous relire et de constater que votre verve ne s'est pas évaporée pendant les chaleurs estivales.
Concernant la place Stalingrad, c'est en effet une bonne idée de la rebaptiser, surtout lorsque l'on a l'esprit que cette ville fut le théâtre d'une des batailles les plus sanglantes de la dernière guerre mondiale.
L'unesco serait alors un cataplasme plus que bienvenu pour ce cataclysme.