"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

samedi 10 septembre 2011

Pour moi la vie va commencer


Si j’en crois cette chère Denise, on m’accuserait d’avoir sciemment oublié d’aborder ici un sujet d’actualité, au prétexte qu’il me mettrait personnellement mal à l’aise. Je veux parler de l’anosognosie, récemment popularisée par les absences répétées d’un ancien président de la République, auteur de célèbres mémoires dont curieusement personne n’avait remarqué les trous. Pour couper court à ces accusations calomnieuses, je tiens à évoquer aujourd’hui dans le détail, sans tabou, ce trouble neuropsychologique à quoi la classe politique paie, sans en avoir toujours bien conscience, un très lourd tribut.

De quoi s’agit-il ? Frappé d’anosognosie, m’explique un vieil ami du CHU, l’individu perd toute conscience de son état, même grave ; il ignore être atteint d’une perte de capacité fonctionnelle, fût-il aveugle ou hémiplégique. S’il a perdu une jambe ou son siège à l’Assemblée nationale, on dit qu’il prétend continuer de marcher ou de siéger, dans le déni total de sa prothèse ou de la personne qui l’a battu aux législatives. Incapable de percevoir qu’il a perdu une fonction cognitive ou élective, il peut aussi être victime du syndrome de l’héminégligence gauche, caractéristique d’une affection qu’on ne saurait circonscrire à l’hémicycle.

Qu’est-ce qu’un sujet héminégligent, me demandera-t-on ? Eh bien, aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est un individu qui ne fait plus attention aux parties gauches des objets de son environnement, voire de son propre corps. Ainsi peut-il ne chausser que son pied droit, ne manger que la partie droite de son assiette, heurter son côté gauche à l'embrasure des portes, ou bien encore être totalement sourd aux arguments de la gauche dans un hémicycle ou une salle de conseil municipal, etc. On reconnaît aussi l’anosognosique à l’annonce répétitive des décisions qu’il a prises. Il est par exemple capable de convoquer chaque semaine la presse pour lui déclarer à nouveau sa candidature à tel scrutin ou à tel autre, secret qu'il semble paradoxalement être le seul à ignorer. C’est donc bien injustement qu’on essaie trop souvent de le faire passer pour un radoteur un peu saoulant ou un obsessionnel assoiffé de revanche.

Soyons francs : souffrir à son insu de cette troublante affection n’offre cependant pas que des inconvénients dans la vie, notamment en politique. Si elle donne à l’électeur attentif une impression erronée de versatilité, l’amnésie rétrograde partielle inconsciente n’explique pas moins en effet que certains élus se contredisent en toute honnêteté, parfaitement ignorants de leur position antérieure. Dans les amphis, en science politique comme en médecine, on cite souvent à ce propos tel grand maire de province réputé osciller, avec une égale sincérité, entre le serment répété d’une ascèse municipale absolue et l’abandon récurrent à la tentation ministérielle. Contrairement pourtant aux apparences, l’anosognosique n’est jamais infidèle à sa parole : c’est toujours elle qui se dérobe et s'évanouit dans la nature !

Nonobstant l’intérêt de cette fascinante pathologie de l’absence, je m’en voudrais de clore le présent billet sans évoquer ce qui devait originellement en constituer le corps : la formidable standing ovation des jeunes pop’ à mon arrivée sur le campus de Marseille, il y a tout juste une semaine ! Nul n’ignore qu’ils m’ont accueilli à notre université d’été comme une véritable star, avec la ferveur de fans exaltés par un concert de Johnny ! Mon Dieu, quelle émotion ! Pour les remercier de leur admiration, folle envie de leur chanter en retour « Pour moi la vie va commencer » ou « Be bop a Lula » (le croirez-vous, certains m'ont assuré me tenir pour le Lula français !)… Benoîte impression d’être le Pape aux JMJ de Madrid ! Gloire à toi, jeunesse mature, lucide et enthousiaste qui honore dans la joie l’auteur-interprète du chant libyen de la Liberté ! Hosanna ! Oui, grâce à toi, jeunesse de France, fort de ta foi, de ta force et de ton soutien, j’ai enfin depuis dimanche l’absolue certitude de conserver mon siège au Parlement en juin 2012 !

1 commentaire:

alphonse a dit…

Madame Denise,

Il faudrait avertir dare-dare tant votre maire d'entrelui qu'à son agasse de prédiclection qu'un double danger les menace.
Un pie bien plus venimeuse est en train de remonter les courants sondagiers à toute vapeur, mine de rien.
L'autre hémisphère du danger consiste en la vague tsunamique d'anosoGNomies aigües qui va ravager les rangs des élus de l'appareil homologue à l'UMP, rive gauche, lorsqu'il s'agira de se remettre en mouvement derrière les oriflammes du Poitou-Charente emmenés par la Lorraine aux pieds nus triomphante des primaires.