"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

mercredi 2 juin 2010

Détendu comme un arc


2013-2016. Bravo ! Grâce à ma pugnacité, ce ne sont que trois petites années supplémentaires que devra finalement attendre notre ville pour être consacrée capitale européenne, effaçant ainsi la gifle cuisante d’une poignée de juges iniques chez qui, en 2008, la partialité le disputait à l’incompétence. Soyons clair : c’est bien de culture que je parle ici, le football ayant acquis au XXIe siècle, dans nos cités, un statut culturel jadis dévolu aux arts et à la littérature, qu’il va bientôt du reste remplacer dans nos écoles, si l’on en croit les projets de Razibus pour ne laisser personne sur la touche. Dimension culturelle mais aussi cultuelle, disons-le tout net, tant les vrais dieux du stade courent en short derrière un ballon rond, plutôt que de s’exhiber indécemment dans des calendriers, tels des rugbymen.  

Ainsi donc encore une fois, j’ai gagné ! Quelle jouissance ! Nul ne pourra plus désormais contester dans cette métropole l’érection d’un immense complexe culturel durable, où accueillir dignement équipes et supporteurs de l’Euro 2016, qu’il s’agisse des rencontres sur l’herbe ou du repos tarifé nécessaire à ces valeureux guerriers, tireurs de coups francs légendaires. Personnellement, c’est avec gourmandise que j’attends  la reddition du grand manitou départemental quand, la tête basse comme un bourgeois de Calais, il me remettra bientôt sur un coussin de velours les clés de son coffre-fort. C’est qu’il va bien falloir qu’il avale la pilule celui-là, même s’il résiste encore avec la détermination d’une marcheuse de rue "Pour la vie", comme nous en avons vu défiler samedi sous nos croisées. 

Dimanche, en me claquant la bise au prétexte de la fête des maires, une vieille dame duveteuse, admiratrice de mon prédécesseur au nom de stade, s’inquiétait de savoir ce que j’allais faire de notre antique pelouse art déco des boulevards, qu’elle aurait vu construire et inaugurer en 1938. Quand je l’ai rassurée, prétendant avoir cinq projets sous le coude, elle m’a curieusement répondu : "Eh bé, moi qui croyais que c’était sur le dos !" Que voulait-elle dire ? Le cerveau humain est hélas, avec le temps, aussi poreux que le béton des stades. Le Général avait raison, "la vieillesse est un naufrage !" J’ai continué de serrer des mains, renonçant à présenter à cette mamie confuse le seul projet auquel je tinsse, par fidélité au message social de l’Eglise. Le voici, en toute confidence. 

J’ai rappelé dans mon dernier billet le pourcentage impressionnant d’administrés vivant au-dessous du seuil de pauvreté dans cette capitale du Far-West européen. Soyons francs : vingt-cinq pour cent, cela fait déjà du monde ! Je proposerai donc bientôt au conseil municipal de dévoluer en l’état notre vieux stade sans emploi aux chômeurs en fin de droits. Sur simple présentation d’une attestation auprès des services sociaux de la mairie, ils se verront allouer une petite parcelle de terrain, jardinet sympathique où faire pousser leurs légumes et élever quelques lapins et quelques poules. 

S’ils le souhaitent, les moins affamés des allocataires auront la possibilité de vendre leurs surplus à la sauvette, sans droit de place ou autre redevance. Les sans-abri seront par ailleurs incités à s’installer durablement sur les gradins couverts, en personnalisant s'il le souhaitent leur espace intime. Il va sans dire que l’accès aux anciennes douches des joueurs leur sera accessible gratuitement une fois par semaine. Denise me suggère de médiatiser cette opération au niveau national, en organisant des visites guidées de ce modèle de reconversion sociale d'un patrimoine municipal, dont ne manqueront pas de s’inspirer d’autres métropoles d’Europe et du monde. Une idée à retenir pour notre prochaine biennale.

On appréciera, je l’espère, ce billet serein, positif et charitable, dont le ton apaisé - j'ai tenu promesse Denise ! - n’est en rien celui d’un homme à bout de nerfs, comme j’ai pu le lire avec stupeur dans notre quotidien local, hélas de plus en plus sous la coupe d’une opposition vipérine. En quoi, franchement, m’ont-ils vu plus agacé que de coutume au conseil de lundi, ces socialistes qui entendaient le transformer en procès de Moscou ? Admettront-ils un jour que je n’aie de comptes à rendre qu’à ma conscience ? Croyez-moi, je n’ai pas dès le premier tour, en 2008, écrasé la liste de Roussy pour être sans arrêt soumis à la question ordinaire de cette inquisition croupion, misérablement relayée par une pie-grièche et revêche qui, cet après-midi même, a eu le toupet de m’attaquer devant les caméras du palais Bourbon, où je n’ai pas mis les pieds depuis trois ans ! C’est tellement plus simple que de m’écrire ou de me dire les choses en face ! Mais je reste calme... Très calme. Non, je ne pèterai pas un câble ! Bon sang de bois, si l’opposition ne me lâche pas les basques, je le jure, je suis prêt à célébrer la prochaine séance du conseil à l’ancienne, le dos tourné à la salle ! Avec mon Gaffiot. Cool, Raoul. Cool.

1 commentaire:

Iker Otsoa a dit…

Oui, le conseil municipal en latin ce serait drôle, et je suis sûr qu'il y en aurait encore pour mettre en doute votre intégrisme...