"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

lundi 13 février 2012

Éclaboussures


Chose rare, reçu ce matin un  curieux courriel de mon ami de l’Intérieur, façon sujet de philo au bac, à commenter : La connaissance poétique est celle où l’homme éclabousse l’objet de toutes ses richesses mobilisées. Certes… Denise, qui le sait aux Antilles, flaire ou soupçonne une citation sans guillemets de Césaire, ce qui ne m’éclaire guère sur le sens de cette énigme... Faute d’imagination sans doute, l’homme qui éclabousse m’évoque le Manneken-Pis à Bruxelles, pompier providentiel dont l’Europe pourrait figurer l’objet de richesses honteusement incendiées, la nuit dernière, par une populace grecque allergique à l'effort… Mais que diable tout cela a-t-il à voir avec la connaissance poétique ? Mon éminent collègue s’adresse-t-il Homère – je veux dire au maire – plutôt qu’au ministre ? Finalement, décidé d'imprimer ce petit texte et de le glisser dans un dossier du conseil municipal, pour tenter de le décrypter discrètement à tête reposée cet après-midi en séance bon moyen de me tenir éveillé lors de l'inévitable intervention outrancière de nos pauvres socialistes…

Entre cet énervant cryptogramme et mon agaçante agasse, il faut dire que j’ai du pain sur la planche en ce moment ! Cette usurpatrice sans vergogne s’est en effet entichée hier de Kant sur un sien blogue, me dit-on…  Si la péronnelle se prend maintenant pour sœur Emmanuel, il y a fort à craindre que la raison pure ne soit hélas dans un état très critique ! Que voulez-vous, on sait bien que tout est prétexte à attaquer le président Rikiki sur les valeurs qui fondent la République !... Friands de démocratie directe, les Françaises et les Français ne sont point dupes cependant, qui attendent avec impatience de pouvoir s’exprimer quand enfin Razibus aura conquis la magistrature suprême.

Soyons francs : c’est avec étonnement que j’ai vu la presse évoquer à ce propos mon opposition présumée aux référendums populaires. Autant il me paraît dangereux de consulter inopportunément un peuple sur des questions régaliennes, autant il me semble en effet utile a contrario de lui lancer quelques os à ronger, sur des questions subalternes que, dans son aveuglement, il considère en général comme essentielles. Ainsi de l’obligation faite aux chômeurs d'accepter le premier emploi qu’on leur propose, par exemple, puisque j’ai moi-même donné l’exemple aux Françaises et aux Français. Quand j’ai perdu mon job de ministre en 2007, un mois seulement après mon recrutement, j’aurais repris aussitôt n’importe quel maroquin. Après trois longues années de galère sans une seule offre à Pôle Emploi, j’ai donc accepté sans rechigner un CDD de trois mois à la Défense, avant de récupérer le Quai libéré par un licenciement pour faute grave. Je n’ai donc de leçons à recevoir de personne !

A propos de Kant, oublié qu’il eût écrit un Essai sur les maladies de la tête, ce que me rappelle un texto de Denise qui m’en propose une pépite à l’intention du ministre de l’Intérieur : « L’homme obtus manque d’esprit, le sot d’entendement ». Me garderai de lui adresser une telle réponse, dans quoi il serait bien en peine de choisir entre les deux options. Avant qu'il ne quitte la Martinique pour aller faire ses pointes de pitre en Guadeloupe, préfère en fin de compte opter pour l’ami Chamoiseau, qui fait joliment écho à Césaire dans son Texaco : « La volonté profonde de tout homme, de tout peuple, de toute communauté quelle qu’elle soit, écrit-il, c’est d’être libre, de sentir son génie éclabousser son lieu et l’inscrire dans le monde ». Superbe, mais je ne suis pas complètement sûr que cet ancien préfet apprécie, tant je le sais soupçonneux de qui pourrait faire lever la patte à son génie sur sa civilisation, pour la marquer comme un nouveau territoire.

5 commentaires:

alphonse a dit…

Moule à gaufre!
(écho d'un commentaire sous vos palétuviers, ci-desous)

Il faut tout de même relire la critique par le vieux Schopenhauer de l'impératif catégorique.
C'est que le Kant-à-lui avait vachement édulcoré aussi ses belles pensées personnelles sur la morale pour faire plaisir aux ecclésiastiques qui le nourrissaient...
Le Vieux lève sa papatte allègement pour renvoyer les astimbranles métaphysiques du prélat rationnel au rayon des arts premiers.
Avec tout le temps libre auquel vous condamne Assad junior, relisez ce petit bouquin d'Arthur: "Le fondement de la morale"...très utile à l'heure de la mort...ce qui ne peut manquer de vous arriver, comme à tout le monde, plus sûrement qu'un hypothétique quinquennat...

Quinquennat! Quinquennat! s'éclaboussent vos cocos dans les palétuviers....

alphonse a dit…

Votre couloir humanitaire en Syrie, Eminence!

C'est un effet du ralliement de Boutin?
On envoie les missionnaires en première ligne, comme pour les évangélisations coloniales..?

Alain Youpi a dit…

Avec son goupillon et l'eau de Lourdes de son affiche de campagne, Razibus va éclabousser les Françaises et les Français pour accomplir son miracle !

alphonse a dit…

Merci pour votre hospitalité, Madame Youpi.
'l bon Vieux vous le rendra!

Ah! oui j'ai postulé pour le jury du Livre Inter. C'est Amélie qui préside. J'ai peut-être une chance..?!
Pour le jury...
pas pour le livre.....

alphonse a dit…

Dites un peu...votre éclabousseur, là...Ma parole, mais ...il fait sous lui...

Quelqu'un lui a-t-il appris à rouler sa chaussette..?

Lire d'urgence le dernier Pennac, "Journal d'un corps"...Inénarrable!