"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

lundi 8 juin 2009

Classe 65 : classe verte !


Mgr Cinquante-et-Un, qui a la pourpre de notre vin, m’assurait l’autre jour en trinquant que, pour lui, mon engagement durable pour l’Europe et l’écologie est la quintessence même du message social de l’Eglise. "C’est un grand bonheur pour Dieu, me faisait-il remarquer, que ses peuples se vouent entre eux l’amour dont ils gratifient la nature qu’Il leur a généreusement confiée : monsieur le maire, vous êtes, urbi et orbi, l’artisan infatigable de la félicité divine !" Ma foi, j’aurais mauvaise grâce à bouder cette onction cardinalice, à quoi fait écho le merveilleux résultat du scrutin européen dans notre ville. Père fondateur trop promptement congédié du développement durable, je fus hier soir consacré par mes administrés comme jamais aucun maire, à tel point qu’ils ont carrément voté deux fois pour moi !


Oui, deux fois, en donnant un tiers de leurs voix aux Bleus et un quart aux Verts ! Soyons francs : je suis donc majoritaire, tralalalalère ! Le jour même de la fête des maires, j’ai raflé la mise, au grand dam de ma pie qui, paraît-il, déchante en se piquant les pattes à son rosier dépérissant. Entre nous, Rikiki peut aller se rhabiller avec son petit trente pour cent ! Sentant monter cette mienne victoire, je lui ai répété la semaine dernière, lors d’un déjeuner fort policé, que sa plus grave erreur fut de se passer de moi en 2007, à la faveur d’un comptage déloyal et honteux des voix de notre deuxième circonscription. Comment prétendrait-il aujourd’hui continuer de me tenir à l’écart des affaires, oublieux que je l’ai porté sur les fonts baptismaux durables ?


Quand la nation lui demande on ne peut plus clairement une ouverture verte, le pire des dénis serait de faire entrer au gouvernement, à ma place, le mammouth retraité du parti socialiste - ver(t)mifuge plus que transfuge celui-là ! Qu’on me rende enfin ma maison, mon Grenelle à moi ! Avant de sortir de table jeudi, j’ai posé une question à Razibus, dont le regard semblait noyé dans son verre d’eau, devant une assiette qu’il avait à peine touchée : "Sincèrement, ai-je jamais manqué à ce gouvernement ? - Non, me répondit-il en souriant doucement, franchement non." Denise s’égare, qui craint qu’il n’ait mésinterprété ma question.


Dit ma sympathie ce midi à notre grande saucisse municipale. Raide sur son vélo, elle a donné un grand coup de pédale sous la pluie, sans un regard, comme une Orange pressée, croyant à tort que j’ironisais sur la déroute de son parti en plein orage. A ce propos, j’ignore si ce qu’on raconte est vrai : dépité par sa chute, le lourdé des Pyrénées aurait, en rentrant dans sa montagne, brisé la petite vierge de plâtre phosphorescente qui, sur la cheminée de sa chambre, éclairait la nuit ses rêves présidentiels. Il en trouvera bien une autre à Lourdes, allez ! Je ne sais ce qui me séduit chez ce lettré rustique ; peut-être une obsession de Gascon partagée. Tout compte fait, il n’est pas loin du but ; il voulait déboulonner : il dévisse. Que voulez-vous, quand on ne lâche pas les basques d’un président qui a la banane, on finit forcément par glisser sur une peau !


Notre évêque et Dieu peuvent être fiers de moi. Fort de mon succès des urnes bleu étoilé, j’ai pu peser aujourd’hui de tout mon poids sur la Commission européenne, qui renonce enfin à son idée stupide de couper rouge et blanc pour en faire du rosé. Ces mélanges sont aussi contre nature en politique qu’au palais, comme le répète à l’envi le leader du Front de Gauche. J’espère que nos viticulteurs se souviendront en 2010 de mon engagement "clairet net", dans les urnes régionales ; cela vaut bien un petit coup de rouquin, non ?


A ce propos, je veux dire à Dany - vieil ami durable - que je suis toujours là, prêt à lui tendre la main sur la route de 2012. Comme jadis sur les barricades où, jeune trublion « au nom de machine à laver », il avait comme moi attiré l’attention du Général. Nous avons le même âge*, à quelques mois près, de part et d'autre de la victoire des Alliés. Touché de retrouver ce matin cette sienne citation, extraite du journal Le Monde du 14 mai 1968 : "Nous voulons un monde nouveau et original. Nous refusons un monde où la certitude de ne pas mourir de faim s’échange contre le risque de périr d’ennui." Quelle prémonition ! Quarante et un an plus tard, croyez-moi, j’échangerais toujours n’importe quoi contre ce risque épouvantable, devenu ma terne réalité.

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* Il est né le 4 avril 1945.

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