"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

vendredi 6 novembre 2009

Le cru et le cuit

Le rikikisme ressortit-il à l’anthropologie structurale ? Voilà une question sur quoi pourraient plancher nos étudiants de sciences po en ce début de novembre humide, dont les vents turbulents déstructurent les grands desseins de notre nano-président. Les sondages se succèdent en effet, qui montrent que les Françaises et les Français ne croient plus le petit Tom. Or nous savons depuis les Mythologiques de Lévi-Strauss que, s’il n’est plus cru, c’est qu’il est cuit. Je m’en réjouis, bien que le temps de cuisson m’ait paru extrêmement long. Enfin le lait déborde à l’Assemblée nationale et au Sénat ! Ne nous pressons surtout pas d’éteindre le gaz sous la casserole ! Il me reste deux ans et demi pour débarrasser le peuple abusé de ce pygmée à "la pensée sauvage".


Face à la fronde qui agite le parti que j'ai mis au monde, ne puis m’empêcher de méditer l’enseignement de l’ancien professeur de philosophie* de mon lycée du chef-lieu des Landes (entre parenthèses, quelle pépinière pour la France, tout de même, que ce lycée !) : "L’humanité est constamment aux prises avec deux processus contradictoires dont l’un tend à instaurer l’unification, tandis que l’autre vise à maintenir ou rétablir la diversification." J’ai été l’étincelle du premier processus ; Razibus craque à son insu l’allumette du second, dans un mouvement dont il a fait une poudrière. L’auteur de "Race et histoire" a-t-il jamais été tenté de se pencher sur les partis politiques, qui sont à leur manière des sociétés primitives ?


A ce propos, je trouve bienvenu le débat sur l’identité nationale lancé à point nommé par le ministre éponyme. C’est un superbe hommage à l’œuvre de Claude Lévi-Strauss qui, Dieu lui eût-il prêté plus longue vie, n'eût point manqué de lui apporter son soutien dans les préfectures, qui sont à leur façon les Collèges de France de nos territoires. C’est pour moi l’occasion de dire ici mon admiration pour le beau travail de ce fidèle transfuge du parti socialiste, excellent auteur en 2007 d’un pamphlet remarqué contre Razibus. Vu son parcours, je ne doute pas de me rallier cet homme d'ouverture et de conviction en 2012. Croyez-moi, la France ne saurait se priver d’humanistes de cette race : ils assurent sa permanence dans l’Histoire, n’en déplaise à mon agaçante agasse.


Puisqu’il est question de ce spectre bavard, un mot de sa dernière croisade. Après les défibrillateurs, voilà qu’elle veut maintenant installer des dépisteurs de cancer du sein à chaque coin de rue, et obliger les Françaises à s’y coller la poitrine en allant faire les commissions ! Si on ne l’arrête pas, elle va demander que le 30 avril soit jour férié pour les femmes ! Pourquoi le 30 avril ? Mais c’est la fête des Robert ! Va-t-elle me sommer de rajouter un milliard au grand emprunt pour cette lubie ? Soyons francs : le dépistage est parfaitement organisé dans ce pays, les femmes y sont dûment incitées ; notre politique est exemplaire au sein de l’Europe, même si la France va de mal en pis - sans mauvais jeu de mots, il va de soi. Pourquoi diable faut-il que les socialistes soient toujours tentés par le démon de l’asservissement ? Tenons-nous en à la liberté de la femme, chèrement acquise, et à l’économie des deniers publics. Quant à vous, madame, tenez-vous en donc à la médecine, qui fait rarement bon ménage avec la politique !


Volontaire du dépistage, Denise chantait ce matin "Le temps des cerises" sous la douche. Ai cru à une provocation, mais il n’en était rien. Cette femme digitale d’exception sait saisir dans l’actualité ce qui me glisse entre les neurones. "A trop pleurer Lévi-Strauss qui avait tout de même cent ans, me dit-elle alors que je lui tendais la serviette, on finit par oublier qu’il laisse un fauteuil vide sous la Coupole..." J’admire ce positivisme exquis, grâce à quoi l’homme peut regarder vers l’avenir au lieu de pleurer dans le sein de sa compagne. Littérateur attitré des fruits rouges et du développement durable, je puis certes prétendre sans rougir à l’immortalité des Verts, qui vaut largement un siège aléatoire au Palais Bourbon. Après tout, pourquoi attendre, comme l'accordéoniste, d’être un ancien président de la République pour entrer à l’Académie, qui n’est pas le Conseil constitutionnel ? C’est décidé Nisa : qu'importe qu'on me prétende grillé, j’entre en campagne !

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* Claude Lévi-Strauss a commencé sa carrière professionnelle comme professeur de philosophie au lycée Victor-Duruy de Mont-de-Marsan. Il l’a hélas quitté bien trop tôt pour avoir le privilège de m’y croiser.

1 commentaire:

Nicolas S. (Paris) a dit…

Moi, je croyais que Levi-Strauss, c'était une marque de jeans. Carla, elle me dit que c'était un anthropologue. Moi, comme je pète la forme, j'ai jamais eu à consulter un anthropologue, je pouvais pas savoir. Est-ce que quelqu'un peut me dire qu'est-ce que c'est comme spécialité médicale ? Et c'est quoi les jeans si c'est pas Lévi-Strauss, hein ? Merci.