"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

mardi 12 avril 2011

"Golden" Boy


Alors que j’aurais dû savourer hier soir la victoire du Droit africain dans mes bottes, embarras et agacement devant les images malsaines du roi nu après son arrestation. Est-ce parce qu’il venait de perdre les deux dernières manches qu’il fallait à tout prix filmer l’ancien président ivoirien en marcel ? Y avait-il besoin de cette ultime humiliation pour que son pays entrât enfin dans Le temps retrouvé de la démocratie ? Non, à ce spectacle, quelque chose en moi semblait interdire que je me satisfisse du devoir accompli… Allez savoir pourquoi, c’est une phrase des Jeunes filles en fleurs qui me traversa l’esprit alors que, plus tard dans ma nuit blanche, l’absence inopportune de Denise sous la couette m’interdisait de goûter le repos du guerrier.

En trempant ce matin dans mon café une petite madeleine amère,  retrouvé les yeux fermés ces lignes de Marcel Proust dans la Pléiade : « Nos désirs s’interfèrent et, dans la confusion de l’existence, il est rare qu’un bonheur vienne justement se poser sur le désir qui l’avait réclamé. » Avouerai-je jamais que j’eusse sans hésiter renoncé à cette victoire africaine pour une autre qui n’était point, hélas, dans les mystérieux desseins de Dieu – servis par moins de cinquante électeurs habités par le diable ! Quel dépit tout de même que, sous-estimant l’importance planétaire de l’enjeu, Ban Ki-moon ait bloqué ma proposition de résolution pour une battue à la pie sur le deuxième canton ! Mon seul vrai désir ne connaîtra-t-il donc jamais le bonheur ? Soyons francs : la Grande Muette peut garder le secret de la Licorne ; moi, avec Milou, je continue de faire Tintin dans les urnes !

Quel scandale à ce propos que, sans doute inspirée par notre opposition hexagonale, la presse internationale se permette d’insinuer aujourd’hui que la France renoue avec les vieilles pratiques de son triste passé colonial ! « Qu’y a-t-il d’anormal à ce que, secourant ce malheureux pays déchiré, notre patrie ait choisi son camp pour défendre aussi l'intérêt des Françaises et des Français ? », me faisait remarquer hier un secrétaire d’État notamment chargé du Commerce et de la Consommation. « Comme aurait dit le nègre de Surinam du Candidat à l’optimisme de Voltaire, ajouta-t-il, "c’est à ce prix que vous mangez du cacao pas cher en Europe". » Cet esclave philosophe avait raison : on n’abandonne pas les chocolatiers à deux semaines de Pâques !

Oui, il fallait en finir avec le bal tragique des prétendants en Côte-d’Ivoire ; la France n’a fait que son devoir, non seulement au péril de la vie de ses soldats mais aussi de notre parti, marqué au Front et à la culotte, laissé sans surveillance pendant nos valeureuses opérations militaires ! Le résultat, c’est que la scission menace à Paris comme à Abidjan ! Quelle tristesse que de voir partir en quenouille le grand mouvement populaire dont j’ai été le génial parturient, il y aura bientôt dix ans ! Désunie, la famille telle le clan court toujours à sa perte ! Veut-on aussi la mienne ? Croit-on vraiment que je puisse dans un an partir à l’assaut de l’Elysée en slip kangourou et en marcel ? C’est Baudelaire, je crois, qui écrit quelque part que « Les nations n’ont de grands hommes que malgré elles – comme les familles. » Est-ce hasard s’il revient ces jours-ci à la mode ? Quel gâchis !

J’ignore si ma dame de pique lit Baudelaire, mais on sait pouvoir la trouver en bonne place à la page des fleurs du mal dans mon herbier intime ! Élevée dans les préfectures comme le poulet des Landes en plein air, la voilà qui crie aujourd’hui au viol de la République ! Qui est coupable de cette abomination ? Moi, évidemment ! Imaginez un peu : le nouveau préfet de notre région n’est autre que l’ancien directeur de cabinet adjoint du meilleur d’entre tous les Premiers ministres de la Ve République ! « Quelle vilenie ! Quel crime abominable ! », hurle-t-elle en canon avec un roquet du conseil municipal qui ne me lâche plus les mollets. Toute cette bave pour une histoire de pedigree ! Des ragots infâmes qui, évidemment, laissent indifférente la truffe avertie des limiers de notre presse régionale. Ne peut-on, comme eux, sagement surseoir à la condamnation tant qu’on n’a pas vu l’homme à l’œuvre ? Contentons-nous donc de retenir pour l’heure que ce grand commis de l’État a tout de même dirigé avec succès la campagne présidentielle d’un candidat de ce parti en 1995. Il peut recommencer : ce n'est pas rien ! Alors, au diable les cerises : mangeons des pommes !

1 commentaire:

Mauricette Bellechard a dit…

Il paraît que ce "Golden" Boy de préfecture n'aime pas les reinettes Clochard. Pensez-vous qu'il va les bouter hors de France ?