"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

vendredi 30 avril 2010

Burqasino


Ma pie voleuse voletant ailleurs en ce printemps, je voudrais profiter de la morosité de l’actualité pour évoquer aujourd’hui la mémoire de Bruno Coquatrix, Lion comme moi dont la France fêtera, le 5 août, le centenaire de la naissance. Homme d’affaires et de music-hall qui nous a laissé des chansons célèbres, on se souvient peut-être moins que le patron de l’Olympia fut aussi un homme politique de droite, que la mort emporta hélas à la fleur de l’âge en 1979, alors que son profil show-biz eût pu à une autre époque le conduire à la magistrature suprême. Qu’il me fasse, depuis sa paisible retraite du Père-Lachaise, l’honneur d’être le fil rouge de ce modeste billet.

Ville de casino comme la nôtre, dont il fut le glorieux maire de 1970 à sa mort, Cabourg ne manquera pas de rendre elle-même à Bruno Coquatrix un émouvant hommage cet été. Je salue au passage la vaillante équipe de football de l’A.S. Cabourg qui, en première division du Calvados, affrontera demain à domicile celle du Sporting Club d’Hérouville-Saint-Clair. Quelque chose me dit que ce sera moins facile pour elle que de recevoir nos valeureux champions de France, acharnés à se faire piétiner n’importe où depuis que leur moral est passé des crampons dans les chaussettes. A qui la faute ? 

Soyons francs : l’humiliation n’est pas la conséquence mais la cause de leur déroute ! Je demande donc solennellement au patron du département de mesurer sa responsabilité dans leur effroyable débâcle, pour mettre enfin la main au gousset et consoler ces garçons désespérés, à qui il faudra bientôt un quart de calva pour trouver la force de partir au casse-pipe, à défaut de leur grand stade ! Qu’attend-on ? Des suicides, comme chez Renault ou à France Télécom ? Cette débâcle me tire moi-même vers le bas et déjà, sur un air de Coquatrix, on chante "Clopin-clopant" sur mon passage dans les allées de la République… Comme pour me faire comprendre que, lui viendrait-il à l'idée de concourir à la primaire présidentielle, le maire UMP de Cabourg me ferait sans difficulté disparaître dans les oubliettes de l’Histoire ! Adieu la victoire en ligue des champions !  

Accablé par des sondages en berne et une conjoncture désastreuse, on comprendra que je broie du noir depuis quelques jours, fuyant mon horoscope à la radio et dans la presse écrite ! Jusqu’à faire la nuit dernière un horrible cauchemar ; sur fond de Dies Irae du Requiem de Verdi, le Général y était traduit pour désertion devant un curieux tribunal militaire : réunis dans une cave voûtée, les juges étaient d’inquiétants curés en soutane corbeau, la tête couverte d’une cagoule pointue de même couleur qui donnait à leur tenue un air de burqa. Qu’avais-je à faire dans cette histoire qui n’était pas la mienne ?  Qui m'y a infiltré pendant mon sommeil ? Pourquoi ?

A en croire Denise, je parlais latin quand je me suis dressé sur le lit en hurlant au milieu de la nuit, le crâne en sueur. Quelle sottise ! Voulant me rassurer, elle me fait finement remarquer aujourd’hui que "burqa", c’est "Cabourg" dans les cités où le verlan fait loi ; elle y voit une possible origine de mon mauvais rêve, qui serait tout bonnement lié à l’actualité du petit Hun. Peut-être a-t-elle raison, mais je doute qu’on connaisse ce lieu de villégiature normande dans les banlieues plus qu'en Chine. Et puis, si le Général épousa la France en secondes noces, il n’en déserta pas pour autant le lit conjugal, sans qu'on l'accusât jamais de polygamie ! Il n’avait comme moi aucun compte à rendre à ce tribunal d’inquisition, indigne de son rang dans ce décor sépulcral. Nous ne sommes ni l'un ni l'autre d'une espèce à mettre les voiles !

A ma connaissance, Yvonne n’a jamais été sifflée non plus à l’Olympia, contrairement à l’actuelle prima donna. C’est qu’elle préférait la fréquentation des églises, dont Colombey, il est vrai, est assez bien pourvu. N’a-t-elle pas du reste fini comme il sied ses jours dans un couvent parisien ? C’était une autre époque en vérité, où les épouses entraient à l’Elysée avec une voilette et un prie-Dieu de préférence à une guitare… 

Ayant besoin d'air pour faire diversion au douloureux cauchemar qui continue de me hanter, je viens de signer une lettre ouverte de notre brouillon cube aux cheveux dans le vent. Il y demande à mon pâle successeur au gouvernement de défendre la cause des éoliennes, qui vaut bien celle des bébés phoques ou des grenouilles. Ah ! Les cheveux dans le vent, quel vieux souvenir !... "Tu crânais moins à cette époque", persifle Denise en me caressant le front avec tendresse... Rappelez-vous, c’était une chanson de Bruno Coquatrix interprétée par Jacques Pills : "Et depuis nous avons vécu des jours de joie / Des jours de peine / Ensemble nous avons vécu une histoire / Simplement humaine"... Oui Nisa, mais pour quoi faire au final, à mon âge ? Prendre la direction du casino, comme Coquatrix à Cabourg ? Cela mérite ma foi réflexion, à défaut d'autre chose : dans notre Cow Parade footballistique, ce pourrait être après tout une bonne vache à lait pour le grand stade ! Faites vos jeux, rien ne va plus, balle au centre !

1 commentaire:

Eloïse a dit…

Pourquoi vous étiez pas dimanche dans l'émission de Drucker sur Antenne 2 pour parler de Coquatrix et de l'Olympia ? Une idée, comme ça : à votre place, moi je profiterais du pataquès pour dépasteuriser l'église et en faire un music-hall ? "Je m'voyais déjà en haut de l'affiche, etc."