"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

samedi 25 septembre 2010

Texto !



Alors que je regardais tranquillement « Plus belle la vie » en mordant dans une banane, reçu hier soir à mon appartement parisien un SMS énigmatique de Razibus : « 1111 revi1pa sur le col1 2 son ashof. » Circonspect, lui ai répondu du tac au tac : « Caisse à dire ? » Aucun retour à cette heure, mais Denise pense avoir trouvé vers minuit, sous l’oreiller, la clé de cette incongruité digitale.

Dépourvu comme on sait d’imagination, j’avoue penaudement être demeuré pour ma part bloqué jusqu’au coucher sur « quatrain » et – hypothèse ô combien moins poétique – la vision de « quatre Huns  », cavaliers herbicides prêts à jaillir de mon portable à l’assaut de notre tendre moquette. Tard dans la nuit, alors qu’un doux rêve m’avait déjà transporté à quelque important sommet de l’ONU, je fus donc réveillé en sursaut par un cri de Nisa, au moment précis où, sous une pluie d’applaudissements,  j’allais prendre solennellement la parole au nom de la France :

- Eurêka ! Mais oui, c’est ça, sommes-nous bêtes ! Le colin est l’autre nom du lieu, claironnait-elle triomphante en rallumant son chevet ! Et deux de ces mystérieux uns sont évidemment des as. Enfin, si tu observes attentivement le regroupement des lettres du clavier de ton iPhone, tu comprendras qu’ashof  se tape comme crime, dont il n’est que le grossier cryptage. Toujours fâché avec les négations, ce petit cancre-là t’a donc en réalité écrit ceci : « un assassin revient pas sur le lieu de son crime. » 

- Mais bon sang de bois, tuer le temps dans une ville de province ne fait pas de moi un assassin tout de même ! Que diable cet énergumène entend-il me signifier par là, m’exclamai-je en rallumant ma lampe à mon tour ?

- Sans doute que tu peux faire une croix sur le ministère des affaires étrangères, où doivent traîner encore tes empreintes digitales sous celles du French Doctor et de quelques autres, qui n’y ont guère laissé d’autres traces, me répliqua Denise dans un bâillement sonore. 

Soyons francs, cette révélation nocturne fut un terrible choc et je ne retrouvai ni le sommeil ni le sommet. Bien informés, mes interlocuteurs chinois n’étaient-ils pas pourtant sûrs de leur fait l’autre semaine ? Pourquoi me refuser maintenant le Quai ? Et à quel portefeuille dois-je me préparer à la fin ! Ne serais-je pas par hasard la victime collatérale de basses manœuvres, dans les arrière-salles de journées parlementaires basques où chacune et chacun grenouillent en se prenant pour un bœuf ? Las ! En ma qualité de titulaire spolié d’un siège municipal au parlement, ma présence eût été légitime parmi mes pairs, dont les débats de marigot eussent gagné en dignité et en hauteur à mon contact. Je note du reste qu’on n’a point vu s’aventurer à Biarritz mon agaçante agasse ; à la fois honteuse de son usurpation et craintive du séant belliqueux de sa voisine de circonscription, on me dit que cette méchante personne se serait en fait réfugiée à Pau, chez ses amis en goguette. Je crains qu'elle ne soit hélas tout aussi indigeste à la sauce béarnaise !

S’il est interdit à l’assassin de retourner sur le lieu de son crime, selon la métaphore sans doute soufflée à Rikiki par son nègre, dois-je me considérer aussi persona non grata au ministère du développement durable, que je n’ai pas tué mais mis au monde  bien au contraire ? Ne murmure-t-on pas pourtant qu’il serait libéré par mon falot successeur, envoyé en cure à Matignon ? Cela dit, si l’ancienne femme d’affaires à l’étranger prend les affaires étrangères, elle me libère Bercy… Est-ce là le sens caché du SMS du n1 – je veux dire de notre grand Tom ? Ce pourrait être au fond un superbe coup de billard à trois bandes… Voire mon point G, me suggère ce matin coquinement Denise : je brille au G8 et au G20 sous présidence française et, si le socialiste du FMI dégomme Razibus en 2012, je le remplace illico à Washington, d’où je reviens pour le battre les doigts dans le nez à la présidentielle de 2017. Machiavélique, aurait dit Mitterrand avec un sourire gourmand d'admiration ! Certes, j’aurai alors 72 ans mais, après tout,  il en avait bien lui-même  plus de 71 à sa seconde élection, et on a fait des papes plus vieux encore à Rome. 

« Vita è bella ! », comme le chante la prima donna à son Chouchou. Oui, plus belle la vie, Nisa bella ! Quelle beauté, il est vrai, que celle des quais de Seine, me disais-je ce matin en descendant acheter une baguette et des croissants ! Tous ces ponts qui enjambent paisiblement leur fleuve, sans une seule protestation ! Cette ville ne se cherche pas, elle est, voilà son secret. Au fond, je me sentais bien à la mairie de Paris… Vraiment aucune envie d’aller me payer lundi un conseil municipal en province ! Il faut vivre avec son temps : voir avec mon légionnaire s’il est trop tard pour organiser une visioconférence. Après tout, ces gens de maison commune  ne doivent-ils pas s'habituer à me regarder désormais sur leur petit écran ?

Aucun commentaire: