"Si tu es amer, plains-t'en." (proverbe gascon)

dimanche 19 octobre 2008

Le redressement


Cru à une blague ce matin dans mon quotidien dominical, qui propose sur le mode interrogatif une tour Eiffel à la cité. De quoi s’agit-il ? Un sculpteur local, nommé Buisson si ma mémoire est bonne (Jean-François et non pas Ferdinand), nous propose rien moins que la passerelle Eiffel en érection. Comment ce vieux pont ferroviaire à la retraite, mais encore vert, me susurre Nisa l’œil coquin, pourrait-il mieux dire à notre métropole qu’elle l’excite enfin après toutes ces années ! Certes, mais accepter telle folie reviendrait à tendre une nouvelle fois l’échine aux verges de l’UNESCO. Très peu pour moi !


Et puis, soyons francs : élever cette ferraille près de la caserne de pompiers de la rive droite, comme sur la photo du journal, vous aurait carrément des allures de mosquée. Qu’on ne compte pas sur moi pour donner dans la provocation, tant il suffit aux électeurs locaux du minaret qui leur est promis, si je veux préserver leurs parcimonieux suffrages. De surcroît, j’entends déjà la minorité municipale railler ma rampe de lancement vers l’Elysée, dans quoi elle me dira aussi droit que dans mes bottes ! Croyez-moi, je me débarrasserais de ce pont avec plaisir si les petits juges du patrimoine mondial m’y autorisaient, mais le dresser là reviendrait à leur planter sous le nez un pylône à très haute tension !


Un détail tout de même, à quoi le soudeur Buisson ne semble pas avoir pensé, puisqu’il ne fait art, nous dit-on, que de la ferraille : quid des piles, qui sont signées Eiffel ? Allons-nous devoir les entasser de guingois rive gauche pour en faire une façon de tour de Pise, à opposer au mécano phallique de notre fou du chalumeau ? Non, comme aurait dit le Christ, il faut laisser les ponts avec les ponts ; ce n’est pas en les dressant comme des flèches de cathédrale que l’homme atteindra jamais Dieu, ni l'art ou le paradis.


On aura compris ma volonté que l’eau continue de couler sous la passerelle Eiffel, plutôt que de mettre à cette dernière la tête dans les nuages. Un maire responsable doit, en ces temps difficiles, penser avant tout aux plus démunis de ses administrés, que la crise financière mondiale va bientôt jeter par milliers dans la misère. Quand ils n’auront plus d’abri, où iront-ils dormir si on dresse leurs ponts comme des lits en cathédrale ? Les yeux dans les yeux, je le dis à ces électeurs : jamais sous mon mandat il ne leur sera imposé pareille brimade !


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